In mémoriam
Raymond Forni, Président du Conseil Régional de Franche-Comté,député durant 20 années, ancien Président de l'Assemblée nationale est mort cette nuit à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière d'une leucémie foudroyante qui l'a emporté en 3 jours.
Fils d'immigrés italiens, devenu français à l'âge de 17 ans, orphelin, ouvrier de chez Peugeot à Belfort, sa ville qu'il aimait tant avant de devenir avocat, notre camarade Raymond Forni était un homme de convictions et de combats. Nous nous souviendrons avec émotion de son grand combat, aux côtés de Robert Badinter, contre la peine de mort. Robert Badinter qui disait de lui qu'il était un homme de coeur et de talent.
Nous garderons le souvenir des propos extraodinairement touchants qui avaient marqué son élection, le 29 mars 2000, à la tête de l'Assemblée, où il devenait le successeur de son camarade et ami Laurent Fabius :
Mon émotion est grande. Même s'il n'est pas d'usage dans une enceinte publique, et en particulier celle-ci, de faire état de sentiments privés, je veux, à cet instant, rendre hommage à ma mère disparue il y a peu, et dont j'aurais souhaité qu'elle connaisse l'issue du scrutin qui m'a porté à ce fauteuil.
Cette gratitude à l'égard de ma mère, qui peut paraître, oserais-je dire, banale, ne l'est pas tant que cela. A travers elle, c'est une reconnaissance à l'égard de la République, celle d'hier, celle de demain, la République qui accueille, qui éduque, qui rassemble, sans distinction de race, d'origine, de couleur ou de religion. Car, en dépit de la fonction éminente à laquelle vous me faites tous accéder, je ne suis pas né français. Fils d'immigrés italiens, que la pauvreté avait fait fuir leur pays, je suis certes né dans ce pays, mais je n'ai pu en acquérir la nationalité qu'à l'âge de dix-sept ans. La France m'a tout donné, et c'est pour cela que, mon sang et mon coeur se mêlant, je crois à l'Europe par-dessus tout.
Mon début a été d'affection, la suite le sera aussi.
D'une rive à l'autre de la Seine, je veux dire à Laurent Fabius, brièvement mais fermement, l'admiration que, comme tant d'autres, je lui porte, et la timidité qui est la mienne d'être son successeur au poste qui est désormais le mien.
J'ai conscience, à travers lui, d'être l'héritier, mais combien hésitant, combien modeste, d'hommes qui ont marqué l'histoire de notre temps. Remontant le siècle, je saluerai Edgar Faure l'étincelant, Vincent Auriol, lui aussi authentique fils du peuple, ou encore celui qui restera comme un monument du parlementarisme : Edouard Herriot.